J-55 : P COMME POTION MAGIQUE
Ah ! Mes amis ! Quelle image forte ! Celle du gros Obélix à Villepinte manquant étouffer au premier rang les vieillards chenus de la droite, sortis tout exprès de leurs placards et sentant la naphtaline : cette pauvre Bernadette Chirac et ce pauvre Jean d’Ormesson. La France moderne, la France forte, retenez-la bien dans vos rétines cette image, c’est celle là. Tout comme celle de ces jeunes WASP de l’UMpie, qui se sont autoproclamés « Populaires », comme si par une formule métonymique magique le contenant pouvait tenir lieu de contenu. Voyez les, ces bons petits soldats sarkolâtres tous revêtus de l’uniforme du candidat, tous déguisés en clones présidentiels, mêmes T-shirts, idées taillées sur-mesure pour le prêt à penser et les formules toutes faites, et cette OPA sur le drapeau bleu-blanc-rouge, kidnapping intolérable du symbole du peuple de la grande Révolution ! Il y avait dans ce grand raout quelque chose de formidablement construit et artificiel. On sentait bien que comme pour les urnes de Poutine, on avait bourré le stade de Villepinte et Depardieu de la même manière.
« Aidez-moi ! » a sangloté le leader maximo. Cri déchirant et véritablement sincère. Car de l’aide il va rudement en avoir besoin s’il veut faire oublier toute la misère engrangée durant son quinquennat et cette guerre à outrance qu’il a menée et veut achever contre les pauvres. Déboussolé par les mauvais sondages, il ne lui restait plus qu’à appeler Obélix en renfort. Bourré de potion magique à 12,5°, Depardieu le touche-à-tout désenchanté qui des Valseuses est passé, en un pas de deux chancelant d’ébriété, aux échos de la valse brune de l’UMP, acteur fatigué qui n’aime plus rien est venu porter son cri d’amour déchu au Capitaine du bateau qui coule.
Ce Sarkozy quand même, on devrait l’appeler le « Capitaine tout et son contraire ». C’est remarquable (quoique relativement peu remarqué par la gent journalistique) combien cet homme peut enfermer tout et son contraire dans un même programme, sans aucun souci de cohérence. L’aplomb de cet homme-là est phénoménal. Et ses outrances feraient sourire si à force de les enfoncer à grands coups de marteau médiatique, elles ne passaient pour des vérités.
Ainsi dans un même discours, Capitaine Tout et son contraire déclare vouloir « réconcilier la France fragilisée » quand il a débuté son speech en opposant les plus démunis d’entre eux (ceux qui bénéficient d’une aide sociale ou d'une indemnisation chômage) à ceux qui travaillent ; et en opposant les Français aux étrangers qui vivent et travaillent sur notre sol. Transformer en quelques secondes le mot « division » en celui de « réconciliation », n’est-ce pas l’effet de la potion magique ? Et passer, quelques minutes plus loin, de chantre du libéralisme (un monde ouvert) à la fermeture des frontières et au protectionnisme, n’est-ce pas mériter amplement ce titre ? Enfin, ne reculant devant aucune absurdité (car qui en France, peut raisonnablement croire ça) ou contre-vérité, prétendre que « c’est la gauche qui a abandonné les quartiers et voulu leur paupérisation » (la gauche ayant la volonté de rendre les pauvres plus pauvres, ça c’est une trouvaille !), quand la ville de Neuilly refuse bec et ongles de voir construire des logements sociaux en son sein, si ça ne s’appelle pas de la démagogie, je ne sais pas comment ça s’appelle. Ce nouveau héros du Made in France qui crie haro sur la concurrence sauvage et qui vient de s’improviser grand protecteur des industries nationales, quand il a laissé fermer plus de 900 usines en 3 ans, ce n’est pas un flagrant délit de mensonge ça ?
Croit-il que c’est en éructant et en répétant, comme pour la méthode Coué, « j’ai dit la vérité », que nous allons le croire ? Et lorsqu’un menteur prétend dire la vérité, doit-on croire le menteur ?
« Etre Président c’est être le comptable des Français ». Qu’il se rassure notre futur ex-président : les Français savent compter tout seuls le nombre d’hôpitaux en moins, les soins essentiels qu’ils ne peuvent plus se payer et se faire rembourser, le nombre d’élèves qui grossit dans les classes tandis que le nombre d’enseignants recule ; ils savent compter ce qu’il leur reste dans le porte-monnaie à la fin du mois ; ils savent que le SMIC n’a pas augmenté, mais que les loyers et le gaz et l’électricité, oui. Alors lorsque avec un formidable aplomb il dit vouloir continuer à « protéger » les Français de la même manière, les Français qui n’ont pas besoin d’un si mauvais comptable, ces Français-là lui disent et vont lui dire le 6 mai prochain de la manière la plus éclatante qui soit : « ta protection, la protection à la Sarkozy, tu peux te la mettre où je pense ! ».
La seule chose qui me rassure, c’est que l’effet de la potion magique ne dure qu’un temps. Les effets se dissiperont bientôt.
Non. Décidément, j’aime vraiment pas la droite. Et j’irais même plus loin : je la hais, je la déteste, je la vomis.
